Cinq nouveaux traitements à l'étude dans le psoriasis en 2013

Paris, France — « La piste des biothérapies dans le traitement du psoriasis se confirme avec la publication d'études de grande envergure qui pourraient modifier rapidement la prise en charge : brodalumab, ixekizumab, briakinumab, apremilast devraient rapidement être indiqués dans les formes graves de cette affection cutanée en dehors de toute atteinte rhumatologique », a expliqué le Pr Selim Aractingi (Paris) à l'occasion des Journées Dermatologiques de Paris organisées par la Société Française de Dermatologie [1].

La voie de l'IL17 : résultats prometteurs avec le brodalumab et l'ixékizumab


La voie de l'IL17 est privilégiée pour les candidats médicaments du psoriasis depuis quelques années. Il faut dire que les biopsies de peau de patients et de modèles murins ont montré que le psoriasis se traduit par une infiltration de lymphocytes CD4Th17 producteurs de cytokine IL17 dans la peau.
« Dans un premier temps, les chercheurs ont tenté d'inhiber le développement de ces cellules sous l'influence de la cytokine IL23 dont le taux est significativement abaissé par l'utilisation de molécules telles que l'ustekinumab ou le briakinumab. Et avec succès…. », précise le Pr Aractingi.
Deux molécules qui interagissent avec l'IL17 ont fait l'objet d'études cliniques en 2012 : deux phases 1 et 2 pour le brodalumab, un anti-récepteur de l'IL17, et une phase 2 pour l'ixékilumab, un anti IL17.
Les deux études de phase 2 évaluant l'efficacité du brodalumab et de l'ixekilumab ont été fondées sur une méthodologie assez similaire : les deux molécules étaient prescrites à des doses progressivement croissantes réparties en 4 à 5 groupes de patients. Les injections de biothérapies étaient effectuées toutes les deux semaines [2,3,4].
A 12 semaines, le brodalumab induit une réduction moyenne de 75 % du PASI 75 (entre 45 et 82 %). Pour sa part - et après le même temps de traitement - l'ixékizumab améliore ce score de 76 à 82 %.
Les seuls effets indésirables de ces deux traitements étaient qualifiés de mineurs : pharyngites, infections respiratoires.

Le briakinumab, anticorps anti sous-unité gp40 de l'IL12-23


L'autre moyen d'interagir avec la voie Th17 est de stimuler l'interleukine IL12-23 qui inhibe les lymphocytes CD4Th17. C'est cette option qui a déjà été testée avec l'ustékinumab.
Le briakinumab est un anticorps monoclonal spécifique de la sous unité gp40 de l'interleukine IL12-23 qui a été récemment testé dans le psoriasis par une étude de phase 3 sur une durée d'un an en double aveugle contre placebo [5]. Cet anticorps a été prescrit dans un premier temps en phase d'induction puis il a été poursuivi en maintenance.
Au total, le briakinumab était efficace chez 80 % des patients traités contre 4 % dans le groupe placebo.
« Ce qui a été remarquable dans cette étude c'est que plus de 60 % des patients répondeurs après la dose d'induction et sous traitement de maintenance par la suite, n'ont pas rechuté pendant l'année de suivi. Cette possible approche préventive doit désormais être prise en considération », analyse le Pr Aractingi.
Mais l'incidence des effets indésirables sera peut être un frein à l'utilisation. En effet, selon les phases de traitement, 22 à 44 % des patients sous briakinumab ont présenté des épisodes infectieux (dont des dermo-hypodermites graves), 1 % des carcinomes (autant baso que spino cellulaires) et 0,5 % un accident cardio-vasculaire.
Ces effets infectieux et oncogéniques s'expliquent par les mécanismes d'action de la voie IL12-23 qui joue un rôle dans l'immunité anti-infectieuse et tumorale. Restent les effets cardio-vasculaires dont le lien avec le traitement doit être encore précisé.

L'aprémilast, inhibiteur de l'isoforme 4 de la phosphodiestérase


L'aprémilast est un inhibiteur oral de l'isoforme 4 de la phosphodiestérase qui joue un rôle clé dans le métabolisme cellulaire en permettant la formation d'AMPc à partir du clivage de l'ATP.
Cette molécule a été testée dans le psoriasis à des posologies croissantes [6]. A la dose de 30 mg par jour, 41 % des patients ont été améliorés.
« Ce chiffre est assez modeste lorsqu'on le compare à ceux obtenus avec les biothérapies, mais il est proche de l'effet du méthotrexate, autre médicament utilisable par voie orale. L'aprémilast pourrait donc trouver une place dans l'arsenal thérapeutique en début de traitement ou dans les formes peu évoluées », conclut le Pr Aractingi.

Autre option : combinaison étanercept + méthotrexate


« Les anti-TNF injectables sont utilisés en association avec le méthotrexate dans les maladies inflammatoires du colon (MICI). Mais ce n'était pas encore le cas pour le psoriasis où ces médicaments (anti-TNF) étaient jusqu'à présent prescrits de façon exclusive. C'est pourquoi des dermatologues américains ont eu l'idée de tester cette association [7] », expose le Pr Aractingi.
L'étude a inclus 239 patients qui ont reçu après tirage au sort, soit de l'étanercept seul (50 mg 2 fois par semaine), soit ce médicament associé à du méthotrexate (7,5 à 15 mg par semaine). Aux semaines 12 et 14, le taux de répondeurs (apprécié par le PASI 75, score de sévérité du psoriasis) était majoré de 15 à 20 % en bithérapie par rapport à la monothérapie.
Mais l'incidence des effets indésirables a, elle aussi, été plus importante et son augmentation a été quasiment proportionnelle (+ 15 %).
Pour le Pr Aractingi « il est donc envisageable en cas d'échec d'un anti-TNF débuté seul, d'y adjoindre du méthotrexate tout en gardant à l'esprit que la surveillance doit, dans ce cas, être plus vigilante ».